19h.

Marika sortit de la douche, ses longs cheveux noirs et mouillés collés contre la peau de son dos alors qu'elle séchait son corps à l'aide d'une minuscule serviette. Elle se dirigea aussitôt jusqu'à sa chambre, abandonnant l'état de nudité complète pour enfiler aussitôt un peignoir de soie rose pâle aux dentelles noires. Un cadeau. Un très joli cadeau. Et aussi très pratique. Elle profita un moment de la chaleur de son appartement, luxueusement arrangé par ses soins (car il était hors de question qu'il ne finisse un jour comme celui de sa... comme celui de sa mère...) et du calme environnant en sortant de la poche de son trench le joli briquet en or qu'elle possédait ainsi qu'une cigarette. Elle fuma un moment, assise sur le lit, l'air de ne penser à rien. Des soirées vraiment calmes, elle n'en connaissait pas. Mais ça ne la dérangeait pas, elle avait besoin de sentir du mouvement, de sentir des ébranlements et comme des secousses, tant dans son corps que dans toute sa vie. Marika tira une dernière fois sur la cigarette et se releva pour passer des vêtements plus adaptés à la situation. Elle sortait ce soir. Comme chaque soir, en vérité. Elle ne semblait jamais être chez elle. D'abord, elle avait son travail de serveuse à temps plein qui la gardait loin de chez elle et elle avait d'ailleurs un couvre-feu imposé plus tardivement du fait qu'elle n'était jamais rentrée à minuit à cause de ses obligations professionnelles. Et lorsqu'elle ne travaillait pas, elle ne passait jamais que pour prendre une douche rapide car elle avait toujours plus important à faire autre part. Parfois, mais c'était rare, Marika passait une soirée toute seule ou prévoyait d'inviter quelques amis. La famille. Ses cousins. Mais bien souvent, elle devait aller à la cantine pour prendre ses repas (ce que ça pouvait l'énerver de devoir partager avec tout ce monde alors qu'elle avait un appartement à elle ! Un appartement à elle, bon sang ! Et qu'elle savait cuisiner ! Très bien, même !) et les dîners privées auxquels elle avait le droit, elle les passait dehors, en ville, auprès d'un gros bonhomme qui la payait très bien juste pour un soirée en compagnie d'une jolie fille.

Une robe de cocktail noire recouverte de tulle, à col V orné de sequins et à fines bretelles. Des bas de soie noire. Une paire d'escarpins en daim noir, aux talons vertigineux. Et un trench coat en coton, ceinturé à la taille. Marika porta un petit chapeau à l'allure un peu cubiste sur ses cheveux lâchés et, son sac en main, elle arrivait, quelques temps plus tard, au Centre Commercial. Oh, elle avait à faire ici, bien sûr que si. Feignant de ne pas regarder les vitrines où tellement de jolies choses étaient exhibées à ses yeux alors qu'elle n'en avait pas les moyens, la jeune femme regarda son T-GAP pour vérifier l'heure.

20H.

Rien de tel que de traîner un peu au centre commercial pour décompresser après une journée de dur labeur. Hey, l'air de rien, c'était pas évident de supporter une matinée entière Airhead qui n'arrivait pas à assimiler que je n'étais pas une Xone (j'avais une gueule de génotype dégénéré franchement ?) et Genious qui n'arrêtait pas pour je-ne-sais-quelle-raison (mis à part celle qui dit que je respire, que je suis dans le même système qu'elle et que je lui réclame un joli petit pécule pour le boulot dont on parlait). Bref, tout le monde faisait la gueule chez les rebelles. Surtout depuis les explosions. Tout le monde sauf moi. Sans doute parce que j'avais obtenu le tiers de ma prime, payée à l'avance, comme à chaque fois que j'acceptais un job (et encore, j'étais gentille avec l'Ekteyãr, à mes autres clients, je réclamais la moitié).

En ressortant du Tube, j'étais passée voir un de mes contacts pour lui demander si des bruits courraient en ce moment sur la Pyramide. Et j'étais passée à mon appartement pour me changer rapidement. J'avais échangé mes baskets, mon large sweat et le Beretta qu'il dissimulait pour un col roulé sans manches et une paire de talons hauts assortis à mon slim. Et j'avais glissé mon Firestar dans un holster cousu dans mon manteau. La plupart des femmes assez futées pour garder toujours une arme sur elles ne l'étaient pas assez pour s'encombrer d'un holster inconfortable (surtout vu le prix du manteau xD). Mais sérieusement, je préférais ça plutôt que de me retrouver morte, le bras encore plongé dans le trou noir qu'était un sac de femme.

Et ainsi équipée pour affronter Andraste, j'avais envoyé un message à un de mes informatrices et j'étais partie... faire un peu de lèche-vitrine. Bah ouais. xD Je gagnais vachement bien ma vie. De temps en temps, il fallait en profiter. Ou plutôt : il fallait tout le temps en profiter. Alors j'avais fait un crocher dans un café à la mode où je m'étais acheté du vrai café en grains pour une jolie petite somme (un des trucs que je comprenais le moins avec les gens, c'était qu'ils adoraient le synthétique : pour eux c'était presque pareil... la logique des gens parfois UU).

Puis un petit détour par une boutique de déco. J'avais envie de changer la décoration de ma chambre depuis un moment déjà. Le bleu palôt, ça allait bien au teint de Samaëlle mais ça commençait à me taper sur les nerfs. J'avais besoin d'un truc un peu plus pep's. Peut-être un orange provençal ? Dans le doute, je pris un nouvel ensemble de literie en 100% coton naturel orange et jaune. Et des rideaux assortis. Bah, on a du fric à dépenser ou on en a pas.

Et j'en avais. Beaucoup même.

Mes emplettes faites, je jetais un oeil sur mon t-GAP. Bon, je serais un peu en avance pour mon rendez-vous mais c'était la coutume. Toujours arriver en avance. Au cas où. Une demie-heure plus tard, je vis arriver mon rendez-vous. Elle était vachement mieux fringuée que moi. C'était clair. UU Mon denim délavé et mon pull noir étaient parfaits (vu les boutiques où je les avais achetés et le prix que je les avais payés, il y avait intérêt !) mais ils manquaient peut-être de classe à côté de la robe de soirée.

Qu'importe. J'avais l'habitude qu'elle vienne toujours dans ses belles fringues et nous savions toutes les deux pourquoi elle était là. J'écrasais sans scrupule ma cigarette dans le cendrier et je m'avançais vers elle avec le sourire d'une personne qui avait rendez-vous avec une amie. ••• Salut toi, comment vas-tu ? ••• M'exclamais-je en glissant mes lunettes sur mon crâne pour lui faire la bise. Le masque s'était glissé naturellement sur mon visage : nous étions dans un lieu public, il n'était pas question d'avoir l'air suspectes. ••• Ca allait la journée ? Tu as l'air épuisée. Viens, je te paie un verre. J'ai vu qu'ils faisaient un nouveau cocktail au Excess. •••